Ma tournée en Roumanie

Les années se suivent mais ne se ressemblent pas : le passage 2021-2022 a été plein de spectacles, celui 2022-2023 m’a fait comprendre que je pouvais entamer des tournées.

La première tournée en 2023 s’est effectuée chez Alexandre. Je la raconte ici.

La seconde se passe en Roumanie, chez mon amie Liliana. Elle fait partie du paysage de ma vie depuis toujours, pour ainsi dire. Cette fois-ci, une force me pousse à aller à Bucarest en plein hiver, fin janvier, et cela tombe bien, c’est son anniversaire. C’est donc l’occasion de lui présenter mon spectacle. Elle connaît mon travail et déclare sa scène ouverte pour moi !

Arrivée à Bucarest. Au moment où j’ai fait la réservation du billet, je me suis dit que j’allais revivre un de ces vrais hivers et me réjouissais de l’expérience, tant à Neuchâtel on a souvent des hivers sans neige. Au moment du vol, la météo a annoncé une période entre 1° et 4° . Flûte ! me suis-je exclamée, mais le plaisir de revoir mes amis l’a emporté. Et, et, et, devinez ? La météo a soudainement changé et il a neigé au point d’encombrer les rues et les trottoirs. Les machines de nettoyage déblaient la rue et déversent la neige sur le trottoir… Je me suis retrouvée comme il y a des années en arrière. Bien sûr, Liliana a trouvé que ma veste n’allait pas du tout et est allée dans son armoire me choisir une fourrure avec laquelle j’ai eu beaucoup de succès !. J’étais vraiment à la maison. Cette chaleur, cette bienveillance spontanée me manquent parfois. Autrefois, quand quelqu’un avait besoin de cinq lei (le niveau de vie n’était pas le même, aussi vais-je dire, Fr 10.- de nos jours ), les amis étaient là pour aider. En Suisse, c’est différent. J’ai donc eu une magnifique fourrure tout le long de mon séjour.

Il est vrai que je n’ai qu’à aller à La Chaux-de-fonds ou à la Brévine pour avoir un vrai hiver, mais là les trottoirs ne sont pas pleins de neige et le crivăț, un vent qui vient de Russie et qui souffle parfois à 30-35 m/s et qui transforme les flocons de neige en petits blocs qui vous tapent sur le visage (quand il est à découvert, aurait ajouté l’écrivain Alphonse Allais) ne souffle pas. Malgré cela, j’ai vu des personnes âgées, avec des paquets aux bras, courir en pleine neige pour attraper le bus dont la plateforme se trouve à hauteur des genoux et sur laquelle elles montent avec aisance ! Je me dis qu’en Europe, à force de tout simplifier et de supprimer les obstacles, les gens ne peuvent plus faire d’efforts.

Théâtre Liliana.

Mademoiselle Ming Ming. C’est mon arrière-grand-mère qui me l’a faite à l’âge de 105 ans ! Elle a l’air un peu sérieux, mais sans cela elle ne serait pas Mademoiselle Ming Ming. Quand elle a su que j’allais à Bucarest, elle m’a dit qu’elle serait du voyage mais qu’il lui fallait un manteau et j’ai dû m’exécuter.

Préparation de la scène. Cela s’est fait en un tourne main. J’avais déjà fait un spectacle sur la terrasse de Liliana et elle avait gardé le fond de scène qui cette fois a servi à couvrir la fenêtre. J’avais pris mes lumières d’effets spéciaux et les prises nécessaires.

La compagnie d’aviation. J’avais prévu de prendre d’autres lumières qui mesurent 120 cm de hauteur, mais la compagnie n’admet que des objets d’au plus 118 cm de hauteur. J’ai appris que si j’avais eu une guitare de 150 m par 40 cm de large, j’aurais pu la prendre, mais les lumières ne figurant pas sur la liste… Je me dis de plus en plus souvent que notre Dürenmatt national n’aurait pas dû mourir, parce qu’il y a tellement de choses « drôles » dans les deux sens du terme. Il faut un certain contrôle de soi pour simplement observer sans s’encombrer de jugements. J’ai dû m’adapter et, devinez, je sors gagnante parce que j’ai trouvé une solution plus simple et plus légère pour mes futures tournées. Finalement, je dois remercier la compagnie d’aviation ! C’est une belle leçon.

Un public de choix. Mon amie a invité son fils, Ion Bogdan Ștefănescu (Ionutz, pour ses amis), le meilleur flûtiste du pays, la fille de ce dernier, Maria, styliste de mode, Ada Vertan, productrice d’émissions à la télévision et de films, Mihai Ispirescu, son compagnon, dramaturge à succès, ancien directeur du Théâtre National ainsi que de la très fameuse revue satyrique et d’humour Urzică (L’Ortie) et Marie-Louise Svoboda, un médecin dentiste. Quant à Liliana, elle a eu une première vie en tant que secrétaire et adjointe de l’ambassade du Venezuela à Bucarest et dans une seconde vie est traductrice d’espagnol en roumain. Elle a traduit une vingtaine de livres. Je disais que je la connaissais depuis presque toujours, je viens d’apprendre qu’au lycée était forte en physique, la seule élève qui résolvait tous les problèmes ! J’adore la mathématique et la physique. Bien que nous soyons amies de longue date, je la regarde avec une autre admiration. De plus, elle aurait choisi comme première langue à l’université le latin, car c’était son point fort ; le sort l’a poussée vers l’espagnol. Ada n’est pas en reste, adolescente, elle a été passionnée par l’astronomie et la photographie. Son professeur lui avait fait un télescope, mais c’est lors d’un voyage à l’étranger qu’elle a dû choisir entre un télescope et un appareil photo. Pour le télescope, elle avait, comme déjà dit, une solution et c’est la photographie qui l’a menée de fil en aiguille vers la production de films. J’en reviens à Liliana qui parle aussi le français et à qui j’ai eu le plaisir d’offrir Ni vent ni nouvelle de Chambaron, et J’ai un mot à vous dire ainsi que J’ai encore un mot à vous dire de Jean-Loup Chiflet, deux personnes qui occupent une place de choix dans mon monde. Je lui ai lu un début du premier livre de Jean-Loup et elle a été conquise. Je vous dis, j’ai eu un public de choix ! Cela aussi me manque.

Le spectacle. Les choses se construisent avec le temps dans mon monde. Aussi mes spectacles de danse sont actuellement de la danse-théâtre et le titre est « Spectacle intimiste de Zully ». S’il est intimiste, c’est que ce n’est pas formel et que donc on est pour ainsi dire dans l’intimité d’une famille et en famille il se passe des choses, des histoires qui restent « entre nous ». Que peut-il se passer ? Des changements de costume, des placements d’accessoires et plein d’autres choses dont certaines dans une dimension imaginaire.

Déroulement du spectacle. Chaque fois que je danse dans un autre cadre, c’est une expérience qui m’enrichit. Cette fois, le public était assis en deux tiers de cercle et il a fallu en plus de m’adapter à un espace différent du mien, penser à ce que les spectateurs voyaient. Dans ce genre de spectacle, le public est proche de la scène, j’entends les respirations, les rires, les plaisirs, les silences. Parfaitement, on peut entendre les silences. Ils disent tellement de choses…

Durée du spectacle et suite. Le spectacle a duré 45 minutes. Lorsqu’il se déroule dans mon studio, on se réunit ensuite dans la salle autour d’un verre. Cette fois-ci, c’est Liliana qui a préparé un repas comme on en préparait autrefois. Elle a passé des heures à la cuisine, même des jours. Il n’y a rien d’autre à dire sinon que c’était très bon. J’ai bu de la tsuica alors que les autres ont pris du vin. J’aime la vodka en Russie et la tsuica en Roumanie. Elles ont un goût particulier sur place. C’est psychologique, mais voilà, chez moi, à Neuchâtel, je ne peux les boire. Il me faut l’atmosphère, et pas n’importe laquelle, celle de mes amis d’autrefois. On a fini au champagne et donc ma tête le lendemain m’a quand même fait savoir que c’était bien assez une fois.

Critique du spectacle. Le premier à avoir dit quelque chose a été Ionutz : « La prochaine fois, tu danses sur MA musique ! » Tout le monde l’a entendu et ri ; le compliment m’a portée aux anges. Je laisse Liliana parler : « Bravo! C’est un spectacle qui sort du commun, une surprise agréable pour mes invités qui t’ont beaucoup appréciée et applaudie avec enthousiasme. Ils m’ont félicitée pour la surprise que je leur ai faite. Je peux te le dire maintenant que tu publies l’article. Je voudrais aussi te dire que tu écris très bien, je te l’ai déjà dit, mais je le répète pour que cela entre dans ta tête !

Les tables de Liliana.

Dès mon arrivée, Liliana a mis de très bonnes choses sur la table. Le jour de son anniversaire-spectacle, elle a mis sur les assiettes les pièces en chocolat que je distribue à mes amis et connaissances en début d’année.
En les distribuant, je précise bien qu’il ne faut pas les mélanger. À vous de voir ce que cela vous dit…

Après le spectacle. Des amitiés se nouent et Ada m’invite à aller voir une exposition de manuscrits inédits de Mircea Iliade. C’était au musée de la Littérature roumaine. C’est impressionnant de voir de tellement près des documents qui ont appartenu à quelqu’un d’autre dans d’autres temps. La notion du temps me fascine aussi. Il a écrit passablement de choses en roumain et j’ai pu les lire facilement. Ești tare ! (Tu es formidable !) s’est exclamée Ada. Là, j’ai eu l’impression de passer un examen.

Comme vous le voyez, dans mon monde tout fait partie du tout. Je veux dire que mon spectacle sert de lien pour bien des choses. En général, c’est la conversation après le spectacle qui fait cela ; cette fois-ci, j’ai l’impression que c’est tout Bucarest qui a été présent à mon spectacle. Ce n’est pas vraiment une image, car, je vous l’ai dit, mon public était un public de choix.

Bucarest et l’électricité. Je sais, je suis insatiable et admiratrice de l’histoire en général. Je ne peux laisser passer ceci : en me promenant dans Bucarest, je trouve cet écriteau près de l’université.

Fin de la tournée.  Ionutz a un concert à la Salle de la Radio. Il nous invite. Je m’apprête à y aller avec le sac acheté à Paris, celui où je mets plein de choses, mon ordinateur compris, et que je trouve beau. Il me rappelle Paris, cette ville que j’aime. Liliana me regarde et me dit : « Tu ne vas quand même pas y aller avec cette plăcintă (il n’y a pas de mot en français, mais c’est comme si on disait ce sac de patates) !  » et elle me donne un vrai sac de dame. J’en ai à la maison, mais n’ai pas pensé à aller à un spectacle autre que le mien… Le concert est magnifique et Ionutz a eu beaucoup de succès auprès du public. C’est normal, il joue comme il est, un être d’une belle âme ! Il soulève l’admiration partout où il va.

J’ai eu de la peine à prendre Ionuț en photo parce qu’il y avait le micro juste devant lui.
On ne peut dire que Ionutz est en chair et en os, mais c’est presque le cas !

Quelques mots au sujet de Ionutz : je l’ai dit, il est le meilleur flûtiste du pays. Liliana, sa mère y est pour beaucoup car elle a fait tout ce qui était en son pouvoir afin de lui donner les meilleurs atouts pour sa profession. Elle est payée en retour par le talent du fils, un talent réel et reconnu par les plus grands dont Sir James Galaway, le fameux flûtiste reconnu mondialement et citoyen d’honneur suisse. Il n’y a pas besoin d’en dire plus. Quand on a fait peu de choses, le CV peut remplir cinq pages, quand on a atteint le sommet, il suffit de donner son nom. C’est aussi le cas de Ionutz, mais cela vaut la peine de dire qu’il a fait son master aux États-Unis, son doctorat à Bucarest et qu’il participe à plein de concerts et programmes de musique. Il est le soliste de La Philarmonique de Bucarest ! Il tient la chaire de flûte à l’université. La muse de la poésie s’est dit qu’elle allait égaler ses dons de musicien en l’inspirant au point qu’il a écrit plusieurs livres de poésie dont le dernier fait déjà partie du patrimoine national. Il ne vous reste qu’à aller sur sa plateforme pour voir qu’il vit pour la musique et la poésie !

Je reprends le fil de mon histoire. Je raconte une de mes aventures à Liliana : je voulais apporter mon concours à un écrivain (parmi mes passions, il y a celle de la langue en général et du français en particulier) afin d’éviter quelques coquilles dans une réédition de quelques-unes de ses oeuvres et il répond que l’éditeur n’a pas le temps. Je peine à trouver une réponse et lui écris :

« Je disais que je cherchais un écrivain pour donner forme à votre annonce au sujet de l’édition de vos livres sans modifications.

« Un esprit qui passait par là s’est dit qu’il allait pouvoir m’aider parce qu’il avait aussi envie de voir, voir, réellement voir ses vibrations, informations, idées, écrites et ensuite les entendre vibrer ! 

« Voici donc que la première chose qu’il m’a dite c’est qu’il faillait vous remercier parce que j’avais appris pas mal de choses en vous lisant et en révisant le texte.

« Il m’a aussi dit que si je me sentais dépitée, découragée, triste (ces émotions ne sont pas réellement de son domaine et c’est pourquoi il n’arrive pas à trouver le mot juste), dans un autre monde la chose se fait et cela devrait m’apporter une certaine sérénité.

« Un autre esprit m’a dit hier soir de continuer à lire l’un des 26 livres écrits par vous et qui se trouvent chez moi sans compter les quelques autres publiés par vos éditions. Il m’a dit que c’était ce qu’il convenait de faire parce qu’il faut toujours rester debout. J’ai donc commencé Titre du livre (afin d’éviter de mettre qui que ce soit en mauvaise posture dans cet article, je ne donne le vrai titre). J’ai bien fait. Une fois de plus, je vous trouve délicieux.

 « Le même esprit, il doit être spécialisé dans les émotions, à moins que ce soit celui spécialisé dans les espoirs, m’a dit que j’allais quand même vous revoir et que c’était cela qui était le plus important dans cette dimension.

 « Bref, tout cela a remué bien des esprits. »

Commentaire de Liliana : Très belle réponse. Tu es toujours entourée d’esprits bénéfiques qui guident tes pas dans des dimensions qui t’enrichissent. Tu es vraiment à part !

Prochaine tournée à Bucarest. Il est prévu que la prochaine fois, je danserai pour un public où il y aura, entre autres, une autre amie de longue date, Ileana Iliescu, la danseuse étoile de mon époque !

Fin, enfin ! La maison de Liliana est pleine de trésors : tableaux, sculptures, objets décoratifs. J’aime les miroirs, les reflets dans les miroirs, les icônes. Cela faisait longtemps que je n’en avais vus. Voici un montage.

Tout cela respire l’harmonie, la beauté, choses qui nourrissent l’âme.

Remerciements à Liliana qui a demandé à Ada de filmer la soirée !

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