Les voies du destin sont insondables, pourrais-je dire en guise de préambule en m’inspirant d’une célèbre phrase. La voie en ce cas précis est le droguiste de ma ville, M. Schneitter. M. Schneitter avec sa droguerie joue un rôle important à Neuchâtel. Il m’a raconté à la fin de l’année passée que sa droguerie, celle de son père et grand-père avait vu le jour dans un bâtiment aujourd’hui intégré à celui de l’UBS. M. Schneitter est aussi présent dans bien des réparations faites chez moi. Je le dis ici. C’est par lui que j’ai connu l’une de ses collaboratrices et son fils de neuf ans. Ce dernier est un garçon éveillé mais qui a du fil à retordre avec la lecture. On le sait, lorsqu’une difficulté apparaît dans notre vie, il faut y faire face et la vaincre car la mémoire que nous avons peut faire en sorte qu’à la prochaine difficulté, on renonce avant de savoir si on peut résoudre ou non l’affaire. Le cas du petit garçon m’intéresse et je tente l’aventure.
La reine Didon. L’un des moyens que j’ai eus pour aider ce garçonnet a été de lui résumer des petites histoires liées à la mathématique, domaine où il a plus de facilités. J’ai commencé par l’histoire d’une reine, Didon, qui avec une peau de boeuf fonda la ville de Carthage, célèbre ville de l’antiquité. En effet, la reine avait dû fuir son royaume en bateau et avait échoué sur les côtes de l’actuelle Tunisie. Elle avait demandé au roi local une terre pour fonder son royaume. Pour se moquer d’elle, il lui a donné une peau de boeuf et lui a dit qu’elle pourrait avoir autant de terres que la peau donnée pouvait en contenir.
La reine Didon était une personne intelligente. Elle a découpé la peau en de très fines lanières et a ainsi fait le pourtour d’une terre passablement grande et qui au fil des ans est devenue la célèbre ville de Carthage.
Le jeune garçon a été enchanté de lire l’histoire et d’apprendre quelque chose de si rusé. Cela m’a encouragée à continuer.
Le signe égal en mathématique. J’ai continué sur la lancée des histoires courtes. En cherchant dans mes livres, je suis tombée sur l’origine du signe égal en mathématique. C’était parfait, car ce signe, il le connaissait, il était en terrain conquis – si l’on peut dire – et en même temps, il allait s’enrichir de bien des façons. Comme est arrivée la période du confinement, on a continué par courriel et par téléphone.

Je n’ai pas trouvé une jolie façon de mettre nos échanges par courriel. Le dessin qui me représente a été fait par mon élève adolescente de 17 ans qui aime dessiner et pour le petit garçon, j’ai eu recours à un dessin arrangé par mon ami, André Oppel, il y a fort longtemps…

C’est un Anglais, plus précisément un Gallois (pays de Galles qui fait partie du Royaume – Uni) qui l’a inventé. Il était fatigué de toujours écrire « est égal à » dans ses calculs. Il a appelé ces deux lignes « jumelles » parce que justement ces deux lignes étaient identiques. Voici son explication : « Si j’ai choisi une paire de parallèles, c’est parce qu’elles sont deux lignes jumelles, et que rien n’est plus pareil que deux jumeaux ». On peut donc dire qu’on a deux jumeaux de chaque côté du signe. Le nom du mathématicien ? Son prénom et son nom de famille commencent par « R » : Robert Recorde. C’était en 1557. Ce devait être un monsieur intéressant car il était aussi médecin.

La plateforme a effacé une partie du discours. Je n’arrive pas à la retrouver, mais on continue avec un courriel qu’il m’a envoyé ensuite.

Me voilà bonne pour aller chercher des informations intéressantes sur les cowboys ! La première chose qui m’est venue à l’esprit a été de lui expliquer que c’était un mot anglais qui joint cow à boy, ce qui correspond au mot vacher ou garçon de ferme. C’est bien moins glorieux en français, car les cowboys ont un rôle de légende dans la conquête de l’Ouest américain ; on voit si bien dans les films.
Pour le moment, je continue avec la mathématique, car pour en faire, il faut pouvoir lire, bien lire et bien écrire. La mathématique a des nombres avec lesquels on fait des calculs corrects ou non et une langue a ses propres « nombres », les lettres, qui forment des mots corrects ou non. D’ailleurs, chez les Grecs anciens, les lettres étaient des nombres. C’est fabuleux. Les choses dans ma vie s’enchaînent les unes aux autres et je retombe sur des notions que le physicien Garnier Malet a rappelées dans ses cours à ce sujet : dans la Grèce ancienne, les prénoms avaient un sens. Maintenant que je pense à mon petit élève, on peut s’amuser à savoir quel nombre a notre prénom.

Ce qui est intéressant ce n’est pas tant la somme obtenue, que le fait de savoir que les lettres étaient des nombres. Mais, peut-être que les nombres sont devenus des lettres étant donné que les peuples ont commencé à compter avant d’écrire.

Je téléphone au petit garçon pour savoir ce qu’il avait pensé au moment où il a su que le signe égal était âgé de 450 ans. Il m’a dit que cela lui avait fait un choc, je suppose qu’il voulait dire une très grande surprise. Sa maman m’a dit qu’il avait ouvert grand les yeux.
On continue à parler du signe égal et je lui dis que j’aimerais bien savaoir comment lui était venue l’idée, à ce monsieur, des deux lignes égales, jumelles : au petit déjeuner ? à midi ? et le petit garçon dit :

Une fois de plus, mes mondes se rejoignent. Je constate que peu importe les générations, les thèmes qui forment mon paysage viennent de partout et en toile de fond, il y a toujours la pensée et son rôle.


Je lui demande s’il connaît la différence entre les chiffres et les nombres. Il répond que les nombres sont deux et les chiffres un seul, 1, 2, jusqu’à 9. Je lui explique que les chiffres sont comme les lettres d’une langue, avec les lettres on compose des mots. Il n’attend pas la fin de mon explication et me récite l’alphabet. Oui, dis-je. Nous, nous avons les chiffres de 0 à 9, comme si c’étaient des lettres et avec eux on compose les nombres. Alors, le nombre 10 est composé de ? Du 1 et du 0, répond-il aussitôt. Il faut comprendre que les chiffres jusqu’à 9 sont les chiffres, mais aussi des nombres. Je ne sais plus quelle explication je lui donne, mais je reprends l’histoire des Grecs avec les lettres qui servent à compter et tout de suite il dit :

Je lui souhaite une belle nuit avec plein de belles pensées. Il répond : à toi aussi ! C’est magnifique.
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