Justo Fontaine – Le footballeur qui touche mon frère David. Rencontre particulière 25

Miroir du football no 34, 1962. En première de couverture : « Juste Fontaine, une carrière fulgurante, une tragédie du sport. »

Je me prépare pour aller à Paris et mon frère me demande de lui trouver la revue citée. Il la lui faut absolument. Je téléphone à mon bouquiniste préféré, François Medioni, qui réalise le miracle. Je peux passer la prendre le premier jour de mon arrivée à Paris.

Je la rapporte et quelques jours après Justo Fontaine se rend au ciel. Mon frère est très ému et il me raconte une partie de la vie de ce footballeur. Je n’ai pas d’amour particulière pour ce sport, mais quand j’apprends le rôle formidable que Justo Fontaine a eu et a encore dans la vie des footballeurs français, mon thermomètre de l’admiration sort et va a son maximum.

Voici le récit de mon frère :

« Découverte de Justo Fontaine. Une semaine après mon arrivée en Suisse, je fus opéré des amygdales, des végétations et des glandes. Quand je me suis réveillé, après mon opération, Mme Amelia Boschel, qui nous avait fait le voyage avec nous et qui savait que j’aimais le football, m’apporta un numéro spécial de la revue Miroir du Football qui venait de paraître et que je garde encore. Sur la couverture, une photo de Justo Fontaine, le meilleur buteur de la Coupe du Monde de 1958 et un titre : « Une carrière fulgurante, une tragédie du sport ». À l’intérieur, un second titre : « Pour que la  vie des footballeurs ne s’arrête plus à l’âge de 29 ans ». Ces deux phrases résument ce que fut la trajectoire de Fontaine dans le football.

J’ai lu cette revue avec passion et découvert une histoire poignante (celle de Justo) en même temps  qu’une écriture pleine de connaissance du football et humaine (celle des journalistes du Miroir du Football et particulièrement celle de François Thébaud, l’éditorialiste).

Que peut-on dire chronologiquement sur le plan sportif de la carrière de Fontaine ? Il a commencé dans son Marrakech natal et fut découvert par Mario Zatelli qui l’a fait venir à Nice en 1953. C’est Luis Carniglia, un entraîneur, qui fit de Fontaine un remplaçant pendant de longues périodes. Cela obligea notre futur héros suédois à changer de club en 1956, ce qui l’amena au Stade de Reims. À partir de ce moment-là son ascension fut…fulgurante.

En 1958, avec le club champenois, il obtint le titre de champion de France et de vainqueur de la Coupe de France. Le meilleur viendra plus tard avec l’obtention de la troisième place de la France lors de la Coupe du Monde en Suède et surtout avec la réalisation de la part de Fontaine de 13 buts lors de cette compétition. Aujourd’hui il détient encore le record d’avoir marqué le plus de buts dans un même championnat du monde.

Le tout en seulement 6 rencontres (3 contre le Paraguay, 2 contre la Yougoslavie, 1 contre l’Écosse, 2 contre l’Irlande, 1 contre le Brésil de Pelé et 4 contre l’Allemagne). Phénoménal !  

En écrivant ces lignes, les larmes me viennent aux yeux, car après l’épopée suédoise, le public put encore apprécier les exploits de l’originaire de Marrakech lors du championnat de France et surtout lors des matches de l’élimination de la Coupe d’Europe des Nations. Cela ne dura que jusqu’au 30 mars de 1960 où un joueur adverse le blessa lui infligeant une double fracture du tibia-péroné, ce fut le début d’une… tragédie du sport.   

Justo se rétablit quelque 8 mois plus tard et fit une dernière apparition contre la Bulgarie lors de la victoire 3-0, un des rares matches où il ne marqua pas de but. Hélas, le 1er  janvier 1961, deux mois après sa dernière sélection, la jambe gauche flancha de nouveau. Il se remit avec beaucoup de volonté, rejoua début janvier 1962 et continua avec bien des difficultés car une de ses chevilles à son tour s’était ankylosée.

La suite est résumée en page 17 du numéro spécial de la revue :Le hasard du championnat a fait que nous ayons revu Fontaine le 15 janvier à Nancy, le 21 nous le voyons contre le Stade Français… Il reste un bon technicien, clairvoyant. Mais, le Fontaine de Suède n’est plus qu’un souvenir. Et nous avons la douloureuse impression que c’est irrévocable… et puis que Fontaine en a conscience.

La carrière de Fontaine est terminée… En juin, il avait fait une tournée en Amérique du Sud… Hélas, il ne tenait même pas une demi-temps. Bien des choses avaient changé depuis 1958… Fini donc le football. Finies les envolées vers le but adverse, puis les buts impossibles. Le président du Stade Reims, Germain, eut le mot de la fin : « Fontaine n’appartient plus au Stade de Reims, mais aux assurances. La loi est la loi…  » ‘ 

Oui, j’ai lu une centaine de fois cette revue et dans les dernières lectures, au moins dans une quinzaine d’entre elles, j’ai espéré trouver une fin différente dans cette page 17, quelque chose comme : « Justo se rétablit á temps et put jouer le match de qualification contre la Bulgarie le 16 décembre 1961. Il trouva en face de lui des adversaires acharnés, mais vous connaissez Fontaine, il sait faire face à ce genre de joueurs, rappelez-vous les Paraguayens lors du match d’ouverture en Suède. Il jaillit comme un félin sur des passes de son complice de Suède, Raymond Kopa, marqua à deux reprises et au bout des 90 minutes la France retrouva de nouveau le chemin de la qualification. »

Ce nest jamais le cas et je continue de relire cette revue car, comme je l’ai mentionné plus haut, j’ai aussi découvert en François Thébaud le meilleur journaliste… de la planète, quelqu’un que j’aurais voulu connaître personnellement tout comme Fontaine, Kopa et Piantoni, les partenaires de Justo Fontaine de l’attaque de la France en Suède en 1958.

De toutes les photos de la revue, celle que je préfère est la suivante, prise après la victoire 6-3 contre l’Allemagne en 1958 :

En haut, à droite, on peut lire : «  Ça, c’est le passé… ».  Mais quel passé !

Protection les joueurs – rôle de Justo Fontaine. Il est à relever que, tout en étant joueur, Justo créa avec N’jo Léa, joueur de Saint-Etienne, et l’avocat Jacques Bertrand, l’UNFP (Union nationale des Footballeurs français). Son objectif fut de créer le « contrat à temps » des footballeurs. À cette époque les joueurs étaient liés… à vie à leurs clubs (assujettissement jusqu’à leurs 35 ans) ,et ne pouvaient changer d’équipe sans l’autorisation de celui-ci ! Ils finirent par obtenir gain de cause. Ce fut l’un des meilleurs buts de Fontaine !

Je finirai ce document en mentionnant que mes copains d’études et de football, à savoir Philippe Guillaume, Patrice Humpal, Franco Balestracci ou François Muller n’ont jamais su ce qu’a représenté pour moi Justo Fontaine. Il s’agit de l’une des personnes auxquelles j’ai le plus pensé dans ma vie. Justo s’en est allé il y a quelques jours et cela m’a fait de la peine. »

Les rencontres particulières. Si j’ai créé cette rubrique c’est parce que je fais des rencontres particulières. Il n’y a pas besoin que la personne soit de ce monde pour que je la rencontre. La premièe a été Georgette Gautier, une femme avec un talent de poétesse remarquable. Elle vient aussi de partir au ciel hier. Et Justo Fontaine entre dans cette catégorie parce qu’il est un personnage que je qualifie de hors du commun, quelqu’un qui a pensé aux autres et qui leur a fait du bien. Cela devrait être la norme. Comme je le dis au début de l’article, c’est en apprenant son rôle pour que les joueurs soient protégés que mon admiration est venue. Le document de mon frère me touche parce qu’il a le sens de la justice et de l’aide à autrui. Il est profondément touché par l’histoire qu’il raconte. Je n’oublierai jamais qu’il a engagé dans un de ses chantiers un ancien copain de quartier qui était un peu handicapé mentalement. Il lui a permis de se faire une place et de gagner sa vie. Il a toujours été une grande âme. Nous partageons ce sens de la justice qui vient de nos parents. Je suis fière de présenter cet article.

Just Fontaine et Justo Fontaine. Il s’agit de la même personne, son prénom de naissance était Just et sa mère, d’origine espagnole, l’appelait Justo. Voilà la raison des deux prénoms sur la Toile.

Autre précision : si David m’a demandé de lui trouver la revue c’est parce qu’à force de lire la sienne, les feuilles sont devenues presque transparentes ! Je trouve que c’est une autre forme d’hommage à Justo Fontaine ainsi qu’aux journalistes et à l’éditorialiste qu’il mentionne.

Le français de la revue : je suis sensible à l’expression, à l’utilisation de la langue et aujourd’hui il y a un tel relâchement, tellement de fautes dans tous les journaux… L’admiration de mon frère pour Justo Fontaine, le parcours glorieux et triste de ce joueur ont fait que j’ai lu l’intérieur de la revue et je dois dire que le français est parfait ! C’est un cadeau.

Le Figaro et David Brunat. Ce journal joue un certain rôle dana ma vie (voir ici) et le départ au ciel de Just Fontaine me fournit l’occasion pour lire ce qu’on a écrit à son sujet. Je tombe sur un article plein d’esprit écrit par l’écrivain David Brunat. Je lui envoie un courriel pour lui demander la permission de lui emprunter la fin de son article ici et il accepte. Je mentionne que j’habite à Neuchâtel et il répond : « Votre message me ravit car il se trouve que l’héroïne de mon dernier livre, une princesse russe qui fut modèle de Matisse dans les années 1930, vécut à Neuchâtel pendant la guerre avec son marie .Je raconte tout cela dans l’ouvrage, intitulé Une princesse modèle, paru aux éditions Héloïse d’Ormesson l’an dernier. Je l’avais d’ailleurs présenté au Salon du Livre de Genève. Il vous intéressera. » Quand je disais que Le Figaro jouait un rôle dans ma vie… Lorsque j’irai de l’autre côté du miroir, je saurai si c’est le hasard, si c’est Serge Dassalult, si c’est Just Fontaine voire même si c’est Beaumarchais (puisque j’ai déjà écrit un article admiratif sur le personnage) qui fleurit ainsi le tapis de ma vie.

Il s’agit de l’article Just Fontaine, une idole française, paru le 2 mars 2023 dans la rubrique Figaro Vox et donc signé David Brunat. L’intégralité de l’article se trouve ici : https://www.lefigaro.fr/vox/societe/just-fontaine-une-idole-francaise-20230302.

En fait c’est une lettre que David Brunat envoie à Just Fontaine et que ce dernier pourra peut-être lire pendant une mi-temps au vert paradis des légendes du ballon rond il est pour l’éternité l’un des plus beaux fleurons (quand je vous dis que c’est plein d’esprit ), et il finit par :

Adieu, Justo, héros au pied d’or et au sourire si doux !

J’adore ce buuuuut où je vois Justo Fontaine traverser les différentes dimenstions pour atteindre le but ultime…

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